Les pauvres paient plus
Dans un livre très ingénieux Martin Hirsch constate : les pauvres paient plus, en proportion de leurs revenus, pour une grande partie des biens et services. Afin de lutter contre cette « double peine », Hirsch critique des prestations sociales qui sont à transformer plutôt qu’à augmenter. Il envisage une tarification globale sous condition de ressources remplaçant les multiples tarifs sociaux. Éreintant, notamment, crédits revolving et jeux de hasard (dont le chiffre d’affaire représente 2% du PIB), il soutient son idée de bouclier sanitaire et rappelle les pistes suggérées, dès son origine, pour améliorer le RSA (fusion avec la prime pour l’emploi et les prestations logement). Envisageant également une sorte de 1 % philanthropique (un pourcentage obligé des impôts affecté à des dons) il propose bien des idées neuves et concrètes contre la pauvreté. Extraits.
La double peine : « Être pauvre, c’est avoir moins d’argent que les autres. C’est d’une affligeante banalité que de le rappeler. Mais ce que l’on sait moins, c’est qu’être pauvre, c’est aussi payer plus cher que les autres pour se loger, s’assurer, se soigner, téléphoner. Le mètre carré de loyer coûte plus cher. Le contrat d’assurance est moins cher »… « Dans ce voyage au cœur de la pauvreté, nous ferons moins appel à vos sentiments qu’à votre raison. Car le royaume de la double peine est aussi le royaume de l’absurde »… « Si, toutes choses égales par ailleurs, les plus modestes payaient le même tarif pour leurs besoins essentiels que le reste de la population, ils économiseraient 6 à 8 % de leurs revenus, sans autre changement ».
Agir autrement : « Trois leviers traditionnels – l’augmentation du SMIC, l’augmentation des salaires, l’augmentation des dépenses sociales – n’ont plus d’effets significatifs sur la pauvreté, comme des râteaux sans dents »… « Nous nous drapons dans nos grands principes et dans notre conviction que nous avons le meilleur système au monde et que nous sommes les champions de la solidarité, mais préférons la solidarité théorique, formelle et coûteuse à la solidarité pragmatique et réelle ».
Sauver le soldat RSA : « Le ‘RSA bashing’ est un sport à la mode. Défendre le revenu de solidarité active s’apparente, du coup, à une gageure. Pourtant les experts ont montré trois réalités positives. Le risque de perdre de l’argent en reprenant un travail a été nettement réduit. Le RSA, conjugué avec la prime pour l’emploi a contribué pour les trois quarts à l’augmentation du niveau de vie des pauvres et aucun effet pervers n’a été mise en évidence sur la précarité de l’emploi et un écrasement du niveau des salaires »…
Martin Hirsch, Cela devient cher d’être pauvre, Stock, 2013, 209 pages, 12,50 euros.