Supprimer le supplément familial de traitement
Il paraît que l’on cherche des économies en matière de politique familiale. De multiples propositions rabotent ici et là un édifice socio-fiscal tous les jours plus compliqué. Plutôt que gribouiller, il est plus efficace, mais plus délicat politiquement, d’y aller franchement. Une prestation sociale, peu commentée, mérite pourtant bien des critiques. Le supplément familial de traitement (connu sous le sigle SFT ou sous l’abréviation SupFatte) est un complément de revenus pour les fonctionnaires. En fonction du nombre de leurs enfants, ils perçoivent une prime qui s’appelle le SFT. Celle-ci ne relève pas, en termes juridiques de la politique familiale, mais du traitement des fonctionnaires. Elle est d’ailleurs imposable, alors que ce n’est pas le cas des prestations familiales. Ce SFT, auquel au fond tout le monde cotise par l’impôt, n’est versé qu’aux agents public et parapublics. Ceci pouvait se légitimer quand les allocations familiales (AF) n’étaient pas encore généralisées. Aujourd’hui on voit mal les fondements d’une telle dépense.
Si l’on prend l’ensemble des différents SFT (des trois fonctions publiques, mais également d’autres corps publics ou parapublics), la dépense annuelle approche les 2 milliards d’euros. Ce montant très important dont on parle peu, est à rapporter aux allocations familiales dont on parle tant (pour éventuellement les moduler ou les supprimer aux « plus aisés »). Ces AF, qui représentent chaque année 16 milliards d’euros de dépense, sont versées à tout le monde, aux fonctionnaires comme aux salariés du privés ou aux indépendants. À partir de deux enfants, tout le monde touche environ 130 euros pour 2 enfants, 300 pour 3 enfants. Le SFT commence au premier enfant (alors qu’il n’y a pas d’AF au premier). Surtout, le SFT est proportionnel au salaire. Plus le traitement de fonctionnaire est élevé plus la prime pour les enfants est importante. D’un côté donc on voudrait rendre dégressives les AF, tout en continuant à faire vivre un SDF progressif. L’ensemble devient bien bancal.
Plusieurs possibilités d’ajustement ont déjà été avancées ces dernières années : supprimer le SFT au premier enfant (qui est d’un montant ridicule) ; forfaitiser son montant pour tous les enfants, (par exemple 30 ou 40 euros par enfant) ; proposer aux bénéficiaires de choisir entre le bénéfice des AF et le SFT . De préférence au tripatouillage des barèmes et mécanismes compliqués des prestations, autant aller franchement vers des réductions. La suppression du SFT pourrait se faire sans trop de griffes, si elle se réalise progressivement. Cette extinction du SFT pourrait épargner une partie des personnels de l’Etat, les militaires en particulier parce qu’ils ont généralement des sujétions familiales singulières. Concrètement, pour une extinction au fil du temps du SFT, deux méthodes se profilent. Vous rendez forfaitaire le montant de ce supplément puis vous ne l’augmentez plus. En une vingtaine d’années il perd toute consistance. Une autre méthode consiste à intégrer cet avantage, pour les personnes le touchant aujourd’hui, dans le traitement par des points d’indice correspondant au prorata du temps passé avec charge d’enfants. Et pour les nouveaux arrivant dans une fonction publique, il n’y a plus cet avantage. En une vingtaine d’années le dispositif s’éteint.
Administrativement et politiquement compliquée, une telle réforme est très souhaitable. Il importe de bien souligner l’illisibilité et l’iniquité du système. En principe il est impossible de cumuler deux SFT dans un couple de fonctionnaires. Or, probablement dans de nombreux cas, il y a cumul, en particulier dans les couples travaillant dans deux fonctions publiques différentes (consulaires, d’Etat, hospitalière). Et ceci devient ingérable avec les divorces et recompositions. Si l’on veut faire des efforts sur la dépense publique et la dépense sociale, le SFT semble donc une bonne cible.