Réduire la pauvreté et les inégalités, un investissement d’avenir pour toute la société
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Plus de 5 millions de Français sont privés d’emploi mais 8,5 millions vivent sous le seuil de pauvreté. Si l’on ajoute qu’en 2012, 25% des personnes sans domicile fixe travaillaient, il apparaît clairement que l’emploi seul ne protège pas toujours de la précarité. Il n’est plus forcément synonyme de promotion sociale : le risque de pauvreté se transmet largement des parents aux enfants, alimentant la peur d’un déclassement durable et bafouant cette notion d’égalité des chances à laquelle nous sommes si attachés.
Dans ce contexte, la maîtrise nécessaire des déficits et de l’endettement public de notre pays ne peut se faire au détriment des plus fragiles, c’est-à-dire des politiques de redistribution sociale et de lutte contre la reproduction des inégalités.
Acteurs de la solidarité, du développement économique, chercheurs, citoyens, nous pensons que l’emploi et la croissance ne suffisent pas à faire disparaître les fléaux qui étouffent notre société : la pauvreté, les inégalités et la stigmatisation des plus fragiles.
C’est pourquoi, nous vous demandons, Monsieur le président de la République, dans le prolongement du plan quinquennal de lutte contre la pauvreté adopté début 2013, et à l’occasion du débat budgétaire, de prendre des mesures ciblées à destination des personnes en situation de pauvreté dans le cadre des politiques de soutien à l’activité que vous mettez en œuvre actuellement.
Grande cause nationale
La mobilisation pour l’emploi doit profiter aux personnes qui en sont les plus éloignées. À votre initiative et sur proposition du collectif Alerte, la lutte contre le chômage de longue durée est devenue une grande cause nationale.
Il est temps que l’État et les partenaires sociaux s’accordent sur des mesures de bon sens : la réorientation d’une partie des crédits de la formation professionnelle en faveur des publics les plus éloignés de l’emploi et l’engagement par les entreprises de pratiques concrètes de recrutement, d’immersion, de tutorat ouvertes à des personnes exclues depuis trop longtemps du marché du travail.
Pour que l’emploi permette de sortir de la pauvreté, il est capital que la fusion annoncée du RSA activité et de la prime pour l’emploi se traduise par une aide simple, versée dès le premier euro gagné, dès 18 ans et d’un montant significatif pour les plus modestes. Il faut garantir, dans la loi de finances 2015, qu’aucun des allocataires actuels en situation de pauvreté ne perde de ressources avec cette fusion.
À cette condition, la politique de soutien au pouvoir d’achat enclenchée par le gouvernement aura un impact sur la pauvreté au travail et donc sur la croissance. Autre enjeu de taille pour un retour à la croissance : la relance de la construction qui doit profiter en priorité au 3,5 millions de mal logés.
Accès et maintien au logement de tous
Le Collectif des associations unies demande depuis plusieurs années une loi de programmation pluriannuelle de logements locatifs très sociaux, la revalorisation significative des aides à la pierre dédiée à la construction sociale et l’accélération de la mobilisation du foncier public.
Il faut mettre fin à la gestion saisonnière de la grande exclusion en proposant des solutions d’hébergement ou de logement dignes aux 140 000 personnes sans domicile, dont le nombre progresse chaque année. Devant l’ampleur de la crise du logement, il faut prévenir les expulsions locatives qui menacent chaque année plus de 40 000 ménages, en revalorisant dans le budget 2015 les aides au logement et en régulant les excès du marché immobilier, en particulier dans les zones tendues où les prix sont bien souvent exorbitants.
Enfin, l’accès et le maintien au logement de tous doivent être garantis par l’instauration d’une couverture logement universelle. L’accès de tous à la santé est également un puissant facteur de lutte contre les inégalités et de compétitivité. Dans le cadre du projet de loi relatif à la santé, le gouvernement aurait l’occasion de donner une nouvelle impulsion aux politiques de prévention, de promotion de la santé et de lutte contre le non recours aux soins des personnes en difficulté.
Nous vous demandons dans ce sens, de simplifier l’accès à la CMU-C et à l’Aide à la complémentaire santé en rendant leur obtention automatique pour les bénéficiaires des minima sociaux et de l’allocation de solidarité aux personnes âgées. Pour permettre aux étrangers malades sans ressources de se soigner dans la dignité et sans stigmatisation, il faut également fusionner la CMU et l’Aide médicale d’État.
Un signal fort
Ces mesures sont autant de moyens de concilier des objectifs de croissance économique et de développement humain. Il est temps d’investir dans le social, d’investir dans la société. S’attaquer aux inégalités dès le plus jeune âge en favorisant l’accès à l’éducation et à la culture des enfants des familles modestes, permettrait de soutenir l’élévation du niveau de qualification de la population, donc la compétitivité du pays.
La création de modes de garde collectifs d’enfants en bas âge, intégrant des actions d’éveil et d’apprentissage, créerait des emplois tout en facilitant l’accès au travail des parents, notamment des femmes.
Le plan pauvreté avait prévu pour les familles modestes des mesures dans ce sens, mettons les en œuvre. Ce plan donnerait un signal fort : la France ne se résigne pas, elle n’abandonne pas ses idéaux de justice et de progrès social et croit toujours en une société unie contre la désespérance sociale.